Mise en place correcte des étangs à poissons
La première question relative à la construction d’un étang concerne la taille et le nombre d’étangs nécessaires.
- Si la production piscicole ne sert principalement qu’aux besoins du ménage et que les alevins sont achetés dans une écloserie, alors seuls deux étangs seront nécessaires.
- Si l’on envisage une activité piscicole indépendante des écloseries, l’agriculteur aura besoin de plus d’étangs : (i) un bassin de reproduction de 10 m x 10 m et une profondeur d’eau de 50 à 80 cm, (ii) deux ou trois bassins d’alevinage de 2 m x 5 m et une profondeur d’eau de 30 à 50 cm, et (iii) deux ou trois bassins de grossissement de 20 m x 20 m ou 20 m x 50 m avec une profondeur d’eau de 50 à 150 cm. En outre, il est recommandé d’avoir un étang de réserve de 10 m x 20 m avec une profondeur d’eau de 50 à 100 cm pour les situations spéciales.
La taille des bassins dépend de l’eau disponible par unité de temps et de l’extension et de l’intensité prévues de la production future.
Analyse pratique d'échantillons de sol
Apportez différents échantillons de sol pour montrer les différences de propriétés. Idéalement, apportez un échantillon de sol argileux, de sol limoneux et de sol sableux et laissez les participants appliquer les différents tests.
Choix du site pour l’élevage en étang
Le système le plus courant et le plus simple pour élever des tilapias est le système d’étangs en terre. Le choix d’un emplacement approprié pour les étangs est essentiel pour assurer un approvisionnement permanent en eau, minimiser les coûts de construction, permettre une gestion facile et éviter les pertes d’eau par infiltration.
- Emplacement – Les étangs à poissons sont idéalement placés près de la maison ou du village afin de minimiser les coûts et les efforts de transport et de réduire le risque de pertes dues au vol. Le site doit être accessible à tout moment et ne pas être sujet à des inondations occasionnelles. Et les étangs ne doivent pas être placés à côté de champs de cultures conventionnelles où des produits agrochimiques sont utilisés, pour éviter de polluer l’eau des étangs. Il en va de même pour la source d’approvisionnement en eau de l’étang, qu’il s’agisse d’un ruisseau ou d’un puits. Les bords de l’étang doivent être protégés par des diguettes, des arbres ou des buissons.
- Proximité d’une source d’eau – Les étangs doivent être situés à proximité d’une source d’eau permanente. Cette source d’eau peut être une source ou un petit ruisseau. La quantité minimale d’eau entrante devrait être d’environ 10 litres par seconde pour un étang d’environ 100 m x 100 m et une profondeur d’eau d’environ 1 m. Les pertes d’eau par évaporation doivent être prises en compte. En général, le besoin annuel en eau pour compenser les pertes par évaporation est de neuf fois le volume de remplissage d’un étang. Veillez à ce que l’eau soit disponible toute l’année.
- Topographie – Idéalement, les étangs sont placés sur une légère pente. Cela permet d’éviter de nombreux travaux de creusement pour réaliser l’étang. Une légère pente de 1 à 4 % est avantageuse (une pente de 1 % correspond à 1 cm de hauteur sur une distance de 1 m).
- Propriétés du sol – La perméabilité du sol doit être minimale pour garantir des pertes d’eau minimales par infiltration. Pour être imperméable à l’eau et rester stable en cas d’inondation, le sol doit avoir une forte teneur en argile. Un sol composé de limon, qui possède les deuxièmes plus petites particules du sol, est également imperméable à l’eau, mais il peut devenir instable lorsqu’il est inondé.
Il existe trois méthodes pour tester l’aptitude du sol :
(i) Test d’infiltration – Creusez un trou et voyez si le sol retient l’eau pendant la nuit à au moins 90 %.
(ii) Pressez un peu de terre dans la main pour voir si sa stabilité est bonne.
(iii) Frottez le sol entre vos mains pour distinguer l’argile du limon. Si tous les tests sont positifs, vous pouvez commencer à prévoir les dimensions de vos étangs.
Évaluation des activités piscicoles locales
Renseignez-vous auprès des agriculteurs sur la pisciculture dans la région en posant les questions suivantes :
- Que savez-vous de la pisciculture ?
- Y a-t-il des agriculteurs qui pratiquent la pisciculture dans la région ?
- Combien d'agriculteurs pratiquent la pisciculture et quelle est la taille de leurs exploitations ?
Construction de l’étang
a. Piquetage de la zone de l’étang
Une fois que le site et la taille de l’étang ont été définis et que les propriétés du sol ont été étudiées, la position des bords de l’étang et la hauteur de la digue sont marquées avec des piquets. La taille de l’étang doit être d’environ 10 m x 10 m et la profondeur de l’eau de 50 à 80 cm. Le fond doit être recouvert de sable ou de gravier.
Avant de placer les piquets pour repérer l’étang, il est important que la zone soit débarrassée des grosses pierres, des arbres et des buissons.
- Les premiers piquets placés doivent être ceux qui se trouvent sur les bords extérieurs de la crête de la digue. La longueur des piquets dépassant du sol correspond à la hauteur de la digue. La hauteur de la digue du côté de l’arrivée d’eau doit être d’au moins 1 mètre.
- Une deuxième série de piquets doit marquer les bords intérieurs de la crête de la digue à une distance de 1 à 2 m des piquets marquant les bords extérieurs. Toutes les extrémités supérieures des piquets marquant les bords extérieurs et intérieurs de la crête de la digue doivent être alignées horizontalement. Ceci peut être réalisé en reliant les sommets des piquets avec une corde et en utilisant un niveau à eau.
- Une troisième et une quatrième série, de courtes chevilles cette fois, sont utilisées pour marquer les bords inférieurs extérieurs et intérieurs des pentes de la digue.
- Enfin, les canaux d’arrivée et de sortie d’eau sont piquetés.
b. Construction des digues
Le sommet de la digue doit avoir le même niveau tout autour de l’étang et doit être environ 0,5 m plus haut que le niveau de l’eau. Si l’étang est construit sur une pente, la hauteur de la digue sera moindre du côté où la profondeur d’eau est faible et plus importante du côté où la profondeur d’eau est grande. Par exemple, si la zone a une pente de 2 %, le fond de l’étang à une distance de 50 m de l’arrivée d’eau sera 1 m plus profond sans qu’il soit nécessaire de creuser (car 2 % de 5 000 cm font 100 cm). Si la profondeur d’eau à l’extrémité peu profonde est de 0,5 m, elle sera de 1,5 m à l’extrémité profonde. Cela signifie que la digue fera 1 m de haut du côté peu profond et 2 m de haut du côté profond.
Les digues de l’étang doivent être imperméables à l’eau pour éviter les infiltrations et rester stables. Le matériau pour la construction des digues est idéalement celui que l’agriculteur obtient lorsqu’il creuse l’étang. Si le sol n’est pas constitué principalement d’argile, il faut construire une tranchée d’étanchéité au centre de la digue.
Le canal d’arrivée d’eau, qui conduit l’eau de la source à la tête du bassin, doit avoir une pente d’au moins 0,2 à 0,5 % pour assurer un bon courant de l’eau entrante. Idéalement, l’arrivée se termine par une cascade ou une fontaine pour oxygéner l’eau. La prise d’eau peut être conçue comme un canal ouvert ou comme un tuyau immergé. Les canaux ouverts doivent être recouverts de dalles à proximité de l’étang pour permettre un travail facile.
Avant de construire la digue du côté le plus profond de l‘étang, il faut installer soit un tuyau de débordement coudé menant au canal de sortie, soit un moine. Les deux servent à réguler le débit d’eau entrant et sortant de l’étang. La sortie d’eau d’un petit étang peut être construite avec un tuyau de débordement. Si la partie verticale du tuyau est située à l’extérieur de l’étang, le niveau d’eau peut être facilement régulé. Ceci est très utile pour les étangs d’alevinage. Dans les grands étangs, les moines en bois ou en béton sont courants, le niveau d’eau étant régulé par des planches de bois. Les extrémités de tous les tuyaux d’arrivée et de sortie d’eau doivent être recouvertes de grilles adaptées pour empêcher les poissons de s’échapper et les poissons étrangers de pénétrer dans l’étang. Les grilles doivent être nettoyées régulièrement pour garantir un débit d’eau précis.
c. Comment procéder pour la construction de l’étang
Pour obtenir du matériau pour les digues et pour rendre l’étang plus profond, l’agriculteur doit creuser environ 30 à 50 cm de terre à l’intérieur de l’étang et dans le canal de sortie d’eau.
1. Tout d’abord, la couche supérieure du sol contenant les racines et les feuilles est enlevée et déposée à l’extérieur de la zone de l’étang. Elle pourra être utilisée plus tard pour recouvrir les digues afin de semer de l’herbe.
2. Dans un deuxième temps, les canaux d’arrivée d’eau sont creusés à 1 m devant la digue (près du tuyau d’arrivée d’eau) et à environ 1 m de l’endroit où l’eau est collectée. Après avoir terminé tous les travaux de creusement, une prise d’eau doit être construite et insérée dans le canal pour pouvoir contrôler le débit d’eau. Lorsque tous les travaux de construction sont terminés, la jonction en terre entre l’étang et la prise d’eau est enlevée et l’eau du ruisseau est conduite dans le canal d’arrivée d’eau. En plaçant différentes planches dans les fentes de la prise d’eau, on peut contrôler le débit d’eau dans l’étang. Une grille supplémentaire peut empêcher les poissons sauvages d’entrer dans l’étang.
3. Si le sol n’est pas composé principalement d’argile, la digue peut être rendue plus stable et imperméable en insérant et compactant minutieusement de l’argile pure prélevée à un autre endroit au centre de la digue, la répétition de cette opération construisant une tranchée d’étanchéité. La tranchée doit être creusée dans le sol avant que les murs de la digue ne soient montés.
4. Cette tranchée se prolonge au‑dessus du sol en utilisant des planches de bois pour le coffrage. On creuse la terre à l’intérieur du marquage par les piquets pour former la partie intérieure des digues par des couches de 20 cm à l’extrémité supérieure et de 30 cm à l’extrémité inférieure. La terre est utilisée pour construire les digues couche par couche, en la tassant bien.
5. Former les pentes intérieures et extérieures des digues. Les pentes intérieures de la digue doivent être moins fortes que les pentes extérieures. Les crêtes des digues des étangs de taille moyenne ou grande doivent avoir une largeur d’environ 1 à 2 m. Les pentes intérieures des digues doivent être construites dans les proportions de 1:1,5 dans le cas de l’argile et de 1:2 dans le cas d’un mélange argile/sable. Cela signifie que dans un sol d’argile pure, la base intérieure de la digue, à l’intérieur du bassin, doit mesurer 1,5 m de long si la digue fait 1 m de haut. La pente extérieure de la digue peut être plus raide : 1:1 dans un matériau argileux et 1:1,5 dans le cas d’un mélange argile/sable.
6. Après avoir formé les digues, les crêtes et les pentes extérieures sont recouvertes de la couche superficielle de terre qui avait été enlevée en premier.
7. Fond de l’étang : le fond de l’étang doit avoir une pente de 1 à 2 % pour permettre un drainage complet pour la capture. Au lieu de créer une pente continue, le fermier peut creuser une dépression près de la sortie au fond de l’étang pour permettre une capture facile et douce des poissons. Une telle dépression présente toutefois l’inconvénient de ne pas permettre la vidange complète de l’étang. L’emplacement et la forme de l’étang peuvent être choisis en fonction de la topographie afin de minimiser le travail de creusement. Le fond du bassin peut être traité avec de la chaux éteinte ou de la chaux vive et de la chaux agricole pour rendre solubles les éléments nutritifs du sol et assainir le fond du bassin. La chaux doit être soigneusement enfouie dans la couche supérieure (5 à 10 cm) du sol. L’utilisation de chaux chlorée est interdite en aquaculture biologique. La quantité de chaux nécessaire dépend du pH du sol et du type de chaux à utiliser.
8. Une fois tous les travaux de terrassement terminés, le fond et les pentes intérieures des digues peuvent être à nouveau tassés.
Remplissage de l'étang
Le remplissage de l’étang prendra quelques jours ou quelques semaines, en fonction du débit de l’eau entrante et du volume de l’étang. Après le remplissage complet de l’étang, il faut vérifier qu’il n’y a pas de fuite d’eau. Les agriculteurs doivent s’assurer que le débit entrant et le débit sortant sont bons, qu’aucun matériau n’obstrue les grilles et que le pH de l’eau est équilibré.
Au bout de quelques jours, la turbidité de l’eau devrait diminuer à mesure que les particules se déposent. Si l’eau entrante est très trouble, un bassin de sédimentation est nécessaire devant l’arrivée d’eau du bassin pour permettre aux particules de l’eau de se déposer.
Les microalgues et autres micro-organismes se développent alors rapidement, faisant passer la couleur de l’eau du brun boueux ou incolore au vert. L’ampleur de la croissance des algues reflète la charge en nutriments de l’eau. On peut facilement l’évaluer en mesurant la turbidité de l’eau à l’aide d’un disque de Secchi (voir transparent 15). Lorsque l’eau a atteint une stabilité chimique et une couleur stable, les premiers poissons peuvent être placés dans l’étang.
Quels poissons utiliser ?
Le choix des espèces à élever revêt une importance particulière. Le poisson le plus courant pour l’aquaculture extensive ou semi-intensive en Afrique est le tilapia. Ce nom fait référence à tout un groupe (tribu) de poissons vivant dans des environnements biologiques très différents. Les tilapias sont indigènes en Afrique, mais seuls quelques‑uns d’entre eux sont vraiment adaptés à l’élevage. Les tilapias les plus couramment utilisés en pisciculture sont : le tilapia du Nil (Oreochromis niloticus), le tilapia du Mozambique (Oreochromis mossambicus), le tilapia monodi (Oreochromis aureus), la perche à tête verte (Oreochromis machrochir), la perche de Zillis (Tilapia zilli) et le tilapia à poitrine rouge (Tilapia rendalli). D’autres poissons populaires cultivés par les agriculteurs africains sont le poisson‑chat africain (Clarias gariepinus) et d’autres espèces de poisson-chat et différentes espèces de carpes (Cyprinus carpio).
Dans l’idéal, les espèces choisies pour la pisciculture sont faciles à gérer, populaires auprès des consommateurs, disponibles en tant que stock dans la région et se développent bien dans les conditions climatiques locales. Dans ce chapitre, nous recommandons de travailler avec des espèces de tilapias et nous nous référons à l’espèce la plus populaire Oreochromis niloticus, le tilapia du Nil. Cette espèce est facile à gérer et est omnivore (c’est‑à‑dire qu’elle se nourrit d’algues et de microalgues ainsi que de zooplancton, de petits crustacés et d’insectes). En Afrique de l’Est, les espèces d’Oreochromis pourraient être plus populaires que les espèces de Tilapia, alors que dans les pays d’Afrique de l’Ouest, la tendance est inverse.
La sélection des espèces dépend également des conditions climatiques locales. Certaines espèces se reproduisent presque toute l’année si les températures minimales de l’eau sont atteintes, tandis que d’autres ont des saisons de frai distinctes en fonction de la température de l’eau. Certaines espèces ont besoin de températures élevées (26 à 30°C) pour bien se développer, d’autres se plaisent à des températures modérées de 22 à 24°C. En outre, la rusticité et la demande en oxygène varient selon les espèces.
Discussion sur les espèces de poissons appropriées
Renseignez-vous auprès des agriculteurs sur les espèces de poissons cultivées localement en posant les questions suivantes :
- Quel type de poisson est couramment cultivé dans la région ?
- Quelles sont les caractéristiques de ces poissons et quelle est l'espèce préférée ?
Si possible, invitez un pisciculteur expérimenté à partager son expérience avec l'espèce de poisson préférée.