Approche par étapes
Le processus de conversion d’une exploitation comporte en général trois étapes. Pour la première, il est généralement recommandé de s’informer sur les méthodes d’agriculture bio adéquates. Dans la deuxième, il convient de s’essayer aux méthodes bio les plus prometteuses sur un choix de parcelles ou champs, pour se familiariser avec ces méthodes. La troisième phase consiste a ne plus utiliser sur toute l’exploitation que des méthodes de production biologiques. L’aide d’un vulgarisateur expérimenté ou d’un collègue paysan est souvent très utile pour guider le néophyte.
1re phase : privilégier la qualité de l’information
Pour réussir, le mode de production bio exige une connaissance approfondie du fonctionnement et des possibilités de gestion des processus naturels. Il est en effet essentiel pour réussir en bio de connaître les possibilités de soutenir les processus naturels pour maintenir ou améliorer les rendements.
On recommande aux paysans qui s’intéressent à l’agriculture bio de prendre contact avec d’autres paysans de la région déjà versés dans ce domaine pour s’inspirer de leurs réalisations. Certains excelleront dans l’art de faire du compost, tandis que d’autres sauront très bien cultiver les engrais verts et des d’autres encore seront des experts dans l’art de préparer des thés de compostage ou des purins de plantes. Cet apprentissage auprès de paysans avec de l’expérience permet d’obtenir des informations de première main de personnes travaillant dans les conditions locales et donc de bien s’informer sur les avantages et les défis potentiels liés à la mise en œuvre des méthodes bio.
Pour l’essentiel, les paysans intéressés à convertir leur exploitation à l’agriculture bio doivent savoir comment :
Améliorer la fertilité du sol.
Préserver la bonne santé de leurs cultures.
Développer au mieux la diversité sur leur exploitation.
Protéger la santé du cheptel.
Mettre en valeur les produits biologiques et comment bien les vendre.
Pour obtenir les informations indispensables, il faut selon les circonstances consulter diverses sources : agriculteurs bio confirmés, cours donnés par des institutions et notamment par organisations non gouvernementales, mouvement national d’agriculture biologique («NOAM») ou encore programmes radio correspondants.
Vous trouverez plus de détails sur les sources d'information ici.
2ème phase : s’essayer aux méthodes d’agriculture bio
Une fois collectée l’information sur les exigences, le potentiel et les principales techniques applicables pendant la conversion, les paysans doivent procéder à leurs propres expériences et en apprendre. Afin de minimiser le risque de mauvaise récolte ou de perte d’animaux et pour prévenir une surcharge de travail frustrante, on recommande de mettre les pratiques bio en œuvre progressivement, sur des surfaces limitées, et de sélectionner à chaque fois quelques techniques seulement et de les tester uniquement sur des parcelles choisies ou sur quelques animaux.
Mais par quoi commencer ? Il est évident qu’il faut commencer par des techniques n’impliquant que des risques et des investissements limités, exigeant peu de connaissances spécifiques, demandant peu de travail supplémentaire et avec un fort impact à court terme. Voici quelques propositions allant dans cette direction :
Paillage – Couvrir le sol de matière végétale morte est une méthode facile permettant de contrôler les adventices et de protéger les cultures de plantes annuelles. C’est une technique que l’on peut mettre en œuvre dans la plupart des systèmes de culture actuels, le principal problème étant parfois de savoir où se procurer la matière végétale appropriée.
Cultures intercalaires – L’association de deux plantes annuelles, usuellement une légumineuse (fèves ou engrais vert) cultivée en rangées alternées avec du maïs ou une autre céréale ou un légume est une pratique courante en production bio, visant à diversifier la production en maximisant le rendement d’un terrain donné. Il faut cependant veiller particulièrement à empêcher que les cultures associées n’entrent en concurrence pour l’accès à la lumière, aux nutriments ou à l’eau. Pour ce faire, il est nécessaire de connaître les associations propices à la croissance, d’une des deux plantes au moins.
Compostage – L’apport de compost aux champs peut avoir un impact majeur sur la croissance le rendement des cultures. Pour lancer une fabrication du compost, les paysans doivent avoir suffisamment de matière végétale et, si disponibles, d’engrais animaux. Si ces matières manquent, les paysans devront en lancer la production sur l’exploitation en semant des légumineuses à croissance rapide pour accumuler de la biomasse et au besoin introduire quelques animaux pour la production de fumier. Ils ont tout intérêt à se familiariser avec la fabrication de compost en profitant du savoir de personnes d’expérience. Une fabrication efficace de compost exige certaines connaissances, une certaine expérience et du travail, mais seulement un investissement modeste.
Engrais verts – La culture de légumineuses pour produire de la biomasse et l’incorporer au sol est une nouveauté pour la plupart des paysans. Pourtant, cette pratique peut grandement contribuer à l’amélioration de la fertilité des sols. Les engrais verts peuvent être cultivés sous forme de jachères améliorées, comme culture saisonnière dans une rotation de cultures ou en bandes intercalées avec d’autres cultures. La production d’engrais vert exige surtout de disposer d’informations fiables sur les espèces à utiliser.
Gestion durable des ravageurs – L’adoption d’un système de gestion durable des ravageurs demande une bonne connaissance du cycle de vie des pathogènes et de leurs interactions avec les cultures, des facteurs influents et de leurs ennemis naturels potentiels. Les paysans utilisant des pesticides de synthèse peuvent débuter en introduisant progressivement la gestion des ravageurs dans leurs cultures selon les préceptes recommandés. Dans ce cas, ils ne doivent recourir aux pesticides que lorsque le seuil de tolérance de la culture est dépassé. Au lieu d’utiliser des pesticides de synthèse, ils doivent essayer les agents de contrôle biologique recommandés ou des remèdes naturels, peut-être seulement sur des surfaces limitées au début.
Semences et matériel de plantation adéquats – Le recours à des semences et du matériel de plantation sains ainsi qu’à des cultivars robustes et/ou améliorés peut apporter des changements importants au niveau de la culture, mais peut aussi exiger des connaissances dans la sélection des semences ou du matériel de plantation, de la disponibilité de variétés améliorées et de traitement des semences.
Plantation de légumineuses arborescentes – La plantation de légumineuses arborescentes (Gliricidia, Calliandra, Sesbania etc.) dans les cultures pérennes telles que les plantations de bananiers, de caféiers ou de cacaoyers, peut améliorer les conditions de croissance des cultures fruitières en les ombrageant, en produisant du matériel de paillage et en fixant l’azote dans le sol. Certaines de ces légumineuses produisent en outre un bon fourrage pour le cheptel. Cette pratique demande des connaissances sur les exigences des cultures arbustives en ombre et en espace et donc sur les distances de plantation appropriées pour ces légumineuses arbustives.
Cultiver ses propres plantes fourragères sur l’exploitation – Les paysans peuvent améliorer l’alimentation de leur cheptel en cultivant des graminées ou des légumineuses fourragères autour des autres cultures, ou encore intercalées ou en rotation avec elles.
Terrasses et digues – La construction de terrasses et de digues le long des courbes de niveau des collines est une mesure clé de la conservation des sols. Cette pratique servira aussi plus tard de base pour l’amélioration continue de la fertilité sur les terrains en pente. Il s’agit d’une mesure hautement efficace mais qui exige beaucoup de travail et dont la réalisation demande de bonnes connaissances dans le domaine.
3ème phase : conversion totale à la production biologique
La troisième phase de conversion consiste à étendre les méthodes de production bio à l’ensemble de l’exploitation et peut être entamée dès qu’on a accumulé l’expérience indispensable. Une fois que la production bio est devenue la règle pour l’ensemble de l’exploitation, le paysan peut se dire producteur biologique.
Normalement, l’adoption généralisée de méthodes culturales biologiques marque le début d’un long processus d’amélioration du système de production consistant à :
(i) améliorer la fertilité des sols par le recyclage de la matière organique produite sur la ferme et développer la production autonome de biomasse ;
(ii) favoriser les interactions positives entre les divers éléments du système de production (l’écosystème fermier) pour en optimiser la capacité d’autorégulation des ravageurs et des maladies ;
(iii) équilibrer production fourragère et taille du cheptel.
Se lancer dans la production bio, c’est aussi entamer un processus d’apprentissage continu basé sur l’observation personnelle, sur le recours à l’expérience de tiers et sur le partage d’expérience avec les autres producteurs biologiques. Les informations ainsi glanées seront mises en œuvre sur la propre exploitation pour la rendre toujours plus durable.
Discussion sur la façon de commencer la mise en œuvre des pratiques biologiques
Demandez aux agriculteurs quelles pratiques biologiques ils connaissent et appliquent déjà dans leurs exploitations. Donnez un aperçu des pratiques et discutez avec les agriculteurs des pratiques les plus appropriées et les plus prometteuses pour commencer. Les pratiques sélectionnées concernent-elles la gestion de la fertilité des sols, la lutte contre les parasites et les maladies, la gestion des mauvaises herbes, l'élevage des animaux ou une autre gamme de production ?
Comment commercialiser les produits de la ferme
Les paysans bio qui produisent pour commercialiser leur production ont tout intérêt à bien connaître le potentiel du marché et les accès aux marchés biologiques. Un enjeu majeur est de valoriser au mieux les produits biologiques de qualité qu’ils cherchent à commercialiser, ce qui exige un savoir-faire spécial. Pour pouvoir commercialiser ses produits dans le canal bio, il faut que l’exploitation soit certifiée. La certification n’est pas indispensable aussi longtemps qu’on ne vend pas les produits comme bio. La décision de certifier l’exploitation doit être prise dans une perspective de commercialiser une part significative des produits fermiers en tant que bio et de pouvoir en tirer un meilleur prix. Ce prix doit être suffisant pour couvrir les frais de certification.
On peut déposer une demande de certification dès que l’exploitation est entièrement gérée en bio. Selon les règles bio en vigueur dans la région, on doit observer une période de transition ou de conversion d’un à trois ans. Durant cette période et en fonction des règles applicables, les produits fermiers doivent soit être commercialisées comme non-bio ou comme bio provenant d’une exploitation en conversion. La plupart des acheteurs actifs sur les marchés d’exportation demandent cependant des produits provenant d’exploitations ayant déjà achevé leur période de conversion.
La commercialisation des produits bio demande beaucoup d’initiative personnelle. Pour accéder aux marchés du pays et locaux, les paysans doivent réussir à convaincre les commerçants et les consommateurs locaux de la valeur de leurs produits. Il faudra éventuellement les inviter à la ferme et leur expliquer les principes de la production biologique en leur montrant les avantages de l’approche bio pour la nature et son impact positif sur la qualité du produit. Les négociants et les consommateurs achètent les produits bio sur la base d’un certificat émis par un organisme de certification bio. Les supermarchés locaux peuvent exiger l’enregistrement de l’exploitation en tant que membre du mouvement national d’agriculture biologique («NOAM») comme garantie supplémentaire de l’engagement bio du paysan concerné. Dans ce cas, il incombe à la NOAM de garantir que les paysans enregistrés produisent en respectant les normes du bio.
Les paysans souhaitant vendre sur les marchés d’exportation par l’entremise d’un négociant devront souvent se plier à des règles supplémentaires. La vente sur des marchés d’exportation exige un bon encadrement par la NOAM ou par la société d’exportation impliquée.
Vous trouverez ici de plus amples informations sur la procédure d'obtention de la certification biologique et sur les approches de la commercialisation des produits biologiques.
Partage d'expériences sur la conversion
Si possible, invitez quelques agriculteurs à partager leurs expériences sur les étapes de la conversion à l'agriculture biologique. Les questions suivantes peuvent vous aider à orienter la discussion : Comment sont-ils entrés en contact avec l'agriculture biologique ? Qu'est-ce qui les a motivés à appliquer des pratiques biologiques ? Quelles recommandations feraient-ils aux agriculteurs concernant la démarche ? A quel stade la certification biologique est-elle devenue pertinente ?
Discussion sur la commercialisation des produits agricoles
Discutez avec les agriculteurs du potentiel de commercialisation de leurs produits agricoles en tant que produits biologiques. Discutez des avantages et des difficultés de la vente des produits sur les différents marchés.
Que cultiver durant la période de conversion ?
Considérant l’exploitation bio comme «un tout», l’accent ne repose pas uniquement sur des cultures spécifiques, mais sur le choix de cultures qu’on pourra aisément intégrer au système existant et qui contribueront à l’améliorer. Le choix en question dépend aussi des connaissances du paysan sur la gestion efficace de ces cultures, de leur contribution à la diversification de l’alimentation familiale ou encore de la demande du marché. En plus de cultiver des plantes alimentaires, les paysans devront peut-être cultiver des légumineuses couvre-sols pour produire du fourrage à forte teneur protéinique pour leur cheptel et dans le but de les utiliser comme engrais vert nourrissant le sol. On recommande dans la plupart des cas de planter des arbres pour l’ombre qu’ils dispensent ou comme coupe-vent, pour le bois de feu, le fourrage ou d’autres usages encore.
Critères de sélection pour les plantes à cultiver pendant la période de conversion :
Les paysans bio doivent en premier lieu cultiver assez de plantes alimentaires pour nourrir leur famille. Mais ils peuvent aussi vouloir produire pour la vente et des recettes permettant de couvrir d’autres besoins de la famille. Ils devraient aussi planter des cultures contribuant à améliorer la fertilité du sol. Les détenteurs de bétail devront produire des graminées et des légumineuses.
b. En principe, les paysans doivent choisir des cultures ne comportant qu’un faible risque d’échec. Les céréales et légumineuses telles que le maïs, le sorgho, le millet, les fèves et les pois sont peu coûteuses à produire, peu exigeantes en nutriments et résistent aussi bien aux ravageurs qu’aux maladies. Elles se prêtent donc particulièrement bien aux cultures de la phase de conversion. On peut y ajouter beaucoup d’espèces traditionnelles, qu’on peut bien stocker et vendre sur les marchés locaux. Les plantes à forte valeur, à consommer rapidement, comme la plupart des légumes, sont plus délicates à cultiver et très sensibles aux atteintes des ravageurs et aux maladies. Il est donc peu recommandé de les cultiver à grande échelle à moins d’être en mesure de faire face aux pertes de récolte.
c. Les plantes destinées à la vente doivent pouvoir être mises en vente à l’entrée de la ferme, dans un stand de bord de route, ou directement transportées vers des marchés urbains voisins. Le choix judicieux des cultures à commercialiser peut demander une certaine connaissance du marché. Le choix de cultures pour les marchés locaux ou d’exportation doit se baser sur des informations détaillées de négociants ou d’exportateurs sur les variétés, les quantités, les qualités demandées et la saison.
d. Pour les cultures pérennes de haute valeur commerciale, tels que les arbres fruitiers, il faut compter au moins 3 ans entre la plantation et les première récolte. Cela en fait de bonnes cultures pour la phase de transition. S’agissant des nouvelles plantations, il faut choisir avec grand soin des espèces et des variétés conformes au marché bio et aux exigences de production. Pour convertir un verger existant au bio, il peut être nécessaire de remplacer certaines anciennes variétés, en particulier si elles sont sujettes aux maladies ou si la qualité du produit ne répond pas aux exigences du marché.
e. Le succès dépend aussi de conditions de croissance favorables. En effet, une culture se développe d’autant mieux qu’elle est plus adaptée aux conditions du sol et du climat local et qu’elle est plus tolérante ou résistante aux principaux ravageurs et aux maladies les plus communes.
f. La plantation de haies et d’arbres agroforestiers peut être précieuse pour diversifier le système de production.
g. En cultivant des légumineuses comme engrais verts, on nourrit le sol. Bien qu’ils ne génèrent pas de revenus immédiats, les engrais verts fertilisent le sol sur le long terme et les rendent productifs.
Beaucoup de paysans veulent voir des résultats rapides et demandent souvent combien de temps est nécessaire à faire pousser des produits bio. Le but de l’agriculture biologique n’est pas d’accélérer la croissance des plantes. Celles-ci se développeront d’autant plus vite et deviendront d’autant plus grandes qu’elles disposeront de meilleures conditions de croissance. S’il est possible, en culture conventionnelle, d’accélérer la croissance à coups d’engrais de synthèse et de pulvérisations, la production biologique poursuit un but différent : faire croître les plantes à leur rythme normal, naturel. Elles seront alors moins sujettes aux atteintes des ravageurs et des maladies et pourront développer une bonne structure physique et nutritionnelle. Il faut toutefois savoir que les producteurs bio font beaucoup pour aider leurs plantes à bien se développer et à produire de bonnes récoltes.
Pour plus de détails sur la gestion de la fertilité des sols , cliquez ici.
Discussion sur les cultures appropriées
Demandez aux agriculteurs quelles sont les cultures qu'ils pratiquent actuellement et discutez avec eux des cultures qui conviendraient le mieux à une gestion biologique :
- Quelles cultures contribuent à une alimentation familiale diversifiée ?
- Quelles sont les cultures qui répondent à la demande du marché ?
- Quel prix pouvez-vous obtenir sur le marché ? Y a-t-il beaucoup de concurrents ?
- Les cultures servent-elles à nourrir le bétail ?
- Les cultures fertilisent-elles le sol ou offrent-elles de l'ombre pour d'autres cultures ou du bois de chauffage ?
- Quelles sont les cultures qui poussent bien ensemble ? Quelles sont les cultures qui contribuent à un système de production diversifié et stable ?
Prévenir les contaminations
Les paysans bio doivent protéger leurs champs biologiques contre les pulvérisations de pesticides de synthèse. Un paysan bio doit pouvoir produire des aliments et des fibres bio même quand son voisin travaille en conventionnel. Pour éviter la dérive des pesticides sur leurs cultures en provenance des champs voisins, les paysans bio doivent protéger leurs terres grâce à une ou plusieurs des mesures qui suivent :
Planter des haies naturelles en limite des parcelles voisines pour prévenir le risque de dérive des pesticides pulvérisés par les vents ou la contamination par les eaux de traitement. Plus cette zone tampon est large, meilleur est son effet.
Pour éviter la contamination à partir de parcelles situées en amont, les paysans bio doivent en détourner l’eau ou s’entendre avec les paysans de l’amont sur les possibilités de collaborer pour minimiser le risque de contamination par écoulement d’eau. Les paysans bio souhaitant protéger la nature doivent pour cela partager leurs connaissances et leur expérience avec leurs voisins dans le but de les aider à adopter la bio ou de réduire autant que possible le risque de contaminer la nature.
Risque de contamination par des organismes génétiquement modifiés (OGM)
Les semences et matériels de plantation génétiquement modifiés sont produits par l’introduction de gènes provenant de plantes, d’animaux ou de microorganismes dans le génome des plantes cultivées par des méthodes autres que la pollinisation et capables de déjouer les barrières naturelles. En production bio, on rejette ces méthodes, car on considère qu’elles violent l’intégrité des cellules, les plus petites entités vivantes. Il ne faut donc pas utiliser de produits génétiquement modifiés en agriculture biologique et les paysans bio doivent par conséquent protéger leurs cultures contre toute possible contamination par des OGM. À cause de la généralisation des plantes génétiquement modifiées (PGM) en agriculture conventionnelle, le risque de contaminations augmente. Les espèces à pollinisation croisée, comme le colza et le maïs, de même que le soja ou le coton, des plantes pollinisées par des insectes, sont naturellement plus exposées au risque de contamination par des PGM cultivées dans le voisinage. Les espèces à multiplication principalement végétative, comme les pommes de terre, le manioc ou les bananes risquent par contre moins d’être contaminées. Au risque de contamination génétique s’ajoute tout au long de la chaîne de production et de commercialisation un risque de contamination physique si OGM et produits bio ne sont pas correctement séparés.
Recommandations pour réduire le risque de contamination par OGM :
N’utilisez que des semences sélectionnées par vous-même ou procurez-vous des semences bio non traitées ni génétiquement modifiées auprès de paysans voisins dont vous êtes certains qu’ils n’utilisent pas d’OGM et dont les champs ne sont pas entourés par des PGM de paysans conventionnels (distance de sécurité minimum : au moins 1 km). Si vous achetez vos semences à un négociant, assurez-vous qu’il est enregistré et peut confirmer la provenance des semences. Vérifiez aussi qu’il n’est pas impliqué dans la production et la multiplication d’OGM. Demandez-lui un certificat prouvant que les semences ne sont pas génétiquement modifiées et demandez-lui s’il est impliqué dans le marché des semences génétiquement modifiées.
Vérifiez les habitudes de reproduction des plantes spécifiques qui vous intéressent. La plupart des espèces à sélection croisée, telles que le maïs, peuvent se disperser par voie aérienne ou par les abeilles sur des distances pouvant atteindre de 1 à 3 km.
Il faut aussi savoir que les semences de certaines plantes de culture peuvent survivre 5 à 20 ans dans le sol et il faut donc s’assurer qu’il n’y a pas eu précédemment des cultures génétiquement modifiées sur un terrain que l’on prévoit de cultiver en bio.
Si des plantes génétiquement modifiées sont cultivées dans la région, protégez vos champs des risques de dispersion de pollen d’OGM en les entourant de zones tampons. Les distances d’isolement entre des cultures génétiquement modifiées et des parcelles bio doivent être 2 à 3 fois plus grandes que pour la production de semences. Pour les plantes à risque telles que le maïs, il faut probablement compter au moins 2 à 3 km. Cette mesure réduira fortement le risque de dispersion d’OGM par le pollen. S’agissant des plantes à pollinisation par le vent, le maïs notamment, des cultures barrières ou des haies de plantes hautes, cannes à sucre ou arbres par exemple, peuvent aider à prévenir les croisements par pollinisation.
Évitez toute contamination physique en utilisant des semoirs, des moissonneuses, des transporteurs, des installations de traitement et de stockage non utilisées pour des cultures génétiquement modifiées. Si vous devez utiliser les mêmes machines, vous devez les nettoyer à fond. N’entreposez pas des produits bio à proximité de produits génétiquement modifiés.
Il faut encourager dans la mesure du possible la création de régions exemptes d’OGM, tout particulièrement pour la production autonome de semences.
Si vous avez des doutes quant à la qualité de vos semences, faites vérifier qu’elles ne sont pas contaminées par des OGM.
Discussion sur le risque de contamination par les OGM
Évaluez la compréhension des OGM par les agriculteurs en leur posant les questions suivantes :
- Avez-vous déjà entendu parler des organismes génétiquement modifiés ?
- Quelles cultures OGM sont cultivées localement, le cas échéant ?
- Savez-vous quels cultivars sont des OGM ?
- Savez-vous quels commerçants vendent des cultures génétiquement modifiées et quels commerçants propagent, transforment et stockent uniquement des cultures sans OGM ?
- Que disent les agriculteurs des cultures OGM ?
- Savez-vous si vos voisins cultivent des plantes génétiquement modifiées ?
- Savez-vous où vous pouvez vérifier vos semences ou vos cultures si elles sont contaminées par des OGM ?
Discutez avec les agriculteurs des mesures de prévention de la contamination des cultures biologiques.
Conversion et procédure de certification
Du point de vue de la certification, la période de conversion débute dès qu’un exploitant commence à gérer sa ferme selon les règles du bio, autrement dit dès qu’il renonce aux pesticides de synthèse, aux fertilisants et aux semences OGM ou traitées. La réduction progressive des produits agrochimiques ne peut pas être considérée comme partie intégrante de la hase de conversion. Une étape importante de la conversion est la reconnaissance de la ferme comme exploitation bio par un organisme de certification. La phase de conversion se termine à la fin de la troisième année ou lorsque la troisième récolte est certifiée bio. Néanmoins, même si la période de conversion est formellement accomplie, l’adaptation à la production biologique n’est pas achevée. Il faut en général encore bon nombre d’années pour créer un écosystème fermier bien équilibré et pour restaurer pleinement la fertilité du sol.
Les règles de base de l’IFOAM (International Federation of Organic Agriculture Movements = Fédération internationale des mouvements de l’agriculture biologique) stipulent que la ferme doit être entièrement gérée en bio. Il en va de même pour tous les autres labels bio du secteur privé, tandis que la plupart des régulations gouvernementales autorisent la certification bio de certains secteurs de la ferme, d’autres pouvant rester gérés de manière conventionnelle. Une telle séparation implique des risques et donc aussi certaines restrictions et contraintes. Pour les petites exploitations, on recommande généralement la conversion de l’ensemble de l’unité de production, car la dimension de l’établissement ne permet pas la cohabitation de plusieurs systèmes de production, une bonne rotation des cultures et l’introduction de bétail sur l’exploitation.
Procédure d’inspection et de certification
Une fois qu’un paysan ou un groupe de paysans a décidé de se convertir au bio, le premier pas en direction de la certification sera de contacter un organisme de certification, de s’informer sur la procédure de certification, frais de certification inclus, et de demander les formulaires d’inscription souhaités. Cela peut se faire à n’importe quel moment de l’année. Le contact entre le paysan et l’organisme de certification peut être établi par un conseiller agricole. Le contact une fois établi, l’organe de certification remettra les formulaires d’inscription au paysan, lui permettant ainsi de démarrer le processus de conversion, le manuel avec les règles à suivre et toutes les informations nécessaires sur la pratique de l’agriculture bio. Le paysan devra alors étudier ces règles puis signer la demande tout en donnant des informations détaillées sur l’exploitation à certifier.
Sur la base de ces documents, l’organe de certification établira un contrat qu’elle enverra au paysan pour signature. Le paysan s’engage à respecter les règles de la production bio ainsi que les conditions inhérentes à la procédure de certification incluant une visite annuelle, l’obligation de tenir un journal et le paiement des frais de certification.
La conversion peut débuter au 1er Janvier ou en cours d’année, au départ de la saison de culture (par exemple à la floraison des arbres fruitiers ou lors des travaux de préparation du sol pour les cultures maraîchères). Dès ce moment, le paysan doit tenir un journal et y noter les achats et l’utilisation d’intrants (engrais, agents de lutte contre les ravageurs et les maladies, semences) de même que la commercialisation des produits (voir module 7). Ce journal servira de référence pour la gestion des cultures et du cheptel en vue de la certification.
Chaque année, l’exploitation recevra la visite d’un inspecteur ou d’un membre d’un système de contrôle participatif (voir module 7). Lors de cette inspection, le paysan donnera des informations sur sa gestion des cultures et du cheptel, sur ses succès et sur ses échecs. L’inspecteur examinera le journal et visitera les champs ainsi que l’étable ou les étables. L’inspection comprendra aussi une évaluation du risque de contamination de l’exploitation par des pesticides de synthèse ou d’éventuels OGM utilisés sur des terrains voisins. Si des produits sont transformés sur l’exploitation, on discutera également des processus utilisés. Plus la communication de la part du paysan sera ouverte et correcte, plus on évitera de possibles malentendus.
Après la visite, l’inspecteur établira un rapport d’inspection qu’il transmettra aux certificateurs pour analyse et décision finale sur la certification. Si l’exploitation respecte le règlement de la production biologique, le paysan recevra le certificat correspondant, avec au besoin des conseils de gestion de l’exploitation. En cas de non-respect du règlement, par exemple, s’il constate une utilisation de pesticides de synthèse, le certificateur n’est pas autorisé à délivrer un certificat (pour les détails, voir module 7).
Muni de ce certificat, le paysan pourra vendre ses produits comme exploitant bio en phase de conversion dans les 2 à 3 premières années. Il pourra les vendre comme produits entièrement bio après la troisième année seulement. La réglementation de l’UE prévoit que le paysan devra vendre sa première récolte comme conventionnelle (et non comme produit bio de phase de conversion).